Hilla Rebay : Pionnière oubliée de l’art moderne

 

La Galerie Raphaël Durazzo annonce sa participation au secteur Showcase de la TEFAF 2025 (15 au 20 mars 2025) à Maastricht, avec la présentation d’œuvres de Hilla von Rebay (1890-1967), pionnière de l’art abstrait.

 

Hilla von Rebay, artiste visionnaire et commissaire d’exposition, est surtout connue pour son rôle crucial dans la création du Solomon R. Guggenheim Museum à New York, qu’elle a fondé et dirigé en tant que conservatrice. Son œuvre graphique, développée en parallèle de ses fonctions curatoriales, est aujourd’hui redécouverte et reconnue comme une influence majeure sur le paysage artistique américaine, tant sur le plan formel que théorique. Rebay faisait partie de la première vague de l’abstraction qui a traversé les États-Unis. Refusant le terme « abstrait », Rebay préférait désigner son œuvre comme de l’art non-objectif. Son travail est une quête de l’absolu spirituel dans l’art, une réponse à la fragmentation du XXe siècle.

 

Hilla Rebay a développé un style unique, créant un cosmos minutieusement pensé en quête d’un idéal esthétique.

 

La sélection présentée par la galerie explore la relation entre le "rythme, la ligne, l’équilibre et la mesure"  et "l’ordre cosmique intérieur". Rebay qualifiait la mise en relation de ces éléments sur la toile de "diagramme de l’âme". Il en résulte des peintures captivantes témoignant de son énergie sans limites.

 

Dès les années 1940, ses œuvres sur toile se distinguent par des compositions centrifuges où des tourbillons de lignes sont traversés par des formes géométriques planes. Triangles, carrés et cercles – les trois formes fondamentales de la peinture non-objective – incarnent pour Rebay des manifestations ultimes de la beauté. Ces formes sont, selon elle, des « moyens d’exercer une influence directe sur l’âme », évoquant des constellations géométriques emportées dans des vortex de couleur.

 

L’approche de Hilla Rebay, à la fois spirituelle et contemplative, a donné naissance à une nouvelle forme d’abstraction géométrique empreinte de lyrisme. Plusieurs décennies plus tard, cette philosophie trouve un écho chez des artistes du mouvement Color Field Painting, tels qu’Ad Reinhardt et Mark Rothko, qui revendiquaient l’effet méditatif des aplats de couleur.

 

Hilla Rebay insiste sur le pouvoir « invisible » de la peinture. Cette philosophie se reflète autant dans ses œuvres que dans son travail de commissaire d’exposition. Au sein d’un environnement immersif et contemplatif, les salles feutrées du Musée de l’Art objectif s’enchaînaient : certaines baignées de musique, d’autres plongées dans un silence absolu. Bien que la muséographie s’en soit trouvée transformée à jamais, sa logique — plaçant l’expérience du spectateur au cœur du processus artistique — a marqué durablement les esprits, en particulier dans le mouvement minimaliste qui a émergé quelques années plus tard.

 

Malgré son influence artistique et curatoriale évidente, Hilla Rebay n’a laissé que peu de traces pédagogiques. Son héritage réside principalement dans les œuvres et la philosophie de l’art qu’elle a transmises indirectement aux générations futures. Son approche conceptuelle et sa quête du spirituel dans l’art ont non seulement redéfini les notions d’abstraction et de beauté, mais ont également inspiré des courants artistiques ultérieurs tels que le minimalisme et l’art méditatif. À travers ses peintures, ses écrits et son rôle dans le développement du Musée de l’Art non-objectif, elle a établi un pont entre la pensée européenne et américaine, contribuant à une reconfiguration globale des pratiques artistiques au XXe siècle.